Expérimenter la créativité des élèves au Musée d’art
En contexte scolaire, les occasions de se frotter à la créativité à l’état pur sont rares. Et c’est là que le Musée d’art entre en scène. Outre les visites «classiques», il offre aux élèves, étudiants et apprentis des possibilités de mettre la main à la pâte dans le cadre d’ateliers.
Le 6 octobre 2022, accompagnés dans le processus par Maria Ceppi, artiste invitée au Musée d’art dans le cadre d’une exposition temporaire, et Ursina Balmer, médiatrice culturelle aux Musées cantonaux, des collégiens de 5e année, en option arts visuels, ont testé le choc de la créativité pendant une matinée. Malgré leur curiosité pour le domaine artistique, ils ont vécu le déséquilibre, phase de perte de repères indispensable pour actionner le mode inventivité.
L’artiste Maria Ceppi et la médiatrice Ursina Balmer
ont formé un duo lors de cette activité de partage autour de la créativité.
Les étudiants avaient visité une première fois l’exposition «Insights», sélection de travaux de Maria Ceppi faisant partie de la collection du Musée d’art et mettant en scène sa démarche exploratrice. Pour cette étape, la médiatrice était leur seule accompagnatrice. Les étudiants avaient alors eu pour mission de préparer des questions à poser à l’artiste dont l’univers intriguant offre une touche de surréalisme et d’humour.
Maria Ceppi a raconté la genèse de sa broderie monumentale intitulée «Zeitdokument».
La seconde visite au Musée d’art s’est déroulée en deux temps. Tout d’abord, la médiatrice a servi d’intermédiaire en organisant la discussion avec Maria Ceppi à partir des interrogations suscitées par la rencontre avec son travail. Devant l’une de ses œuvres, alliant une banane trop mûre et la cartouche d’un stylo, elle explique que ce qui l’intéresse, c’est la poésie du quotidien, en faisant dialoguer le corps et l’objet tout en jouant avec les dimensions. Ainsi, à travers son approche expérimentale, elle raconte des histoires que chaque visiteur réinterprétera avec son ressenti. En milieu de matinée, l’atelier co-organisé par l’artiste et la médiatrice a permis de laisser place à la créativité des jeunes.
L’artiste a alors présenté son projet créatif et participatif «Frozen Moments», où des temps d’échange avec des invités sont transformés en «instants congelés». Les objets ayant servi de base au dialogue sont alors enveloppés de plastique, mis sous vide puis moulés, avant d’être exposés sous forme de traces figeant l’éphémère. Avant la rencontre, les étudiants savaient qu’ils devraient se répartir en trois équipes autour d’un thème libre. Le premier groupe a souhaité aborder le futur de l’art, le deuxième l’astronomie et le troisième les objets mystérieux. Les collégiens avaient dû prendre avec eux quelques objets en lien avec le thème retenu, mais sans connaître la suite de la démarche, aussi certains n’ont pas pu être intégrés, car il fallait s’en séparer. Pour entamer ce dialogue, l’artiste avait disposé sur une table toute une série d’objets: Elle leur en a suggéré un à intégrer à leur récit, les autres étant à choix.
Au moment de se lancer, c’est un peu la panique à bord des équipages. Il leur semble presque impossible de s’exprimer avec tant de liberté, puisque tout est possible, sans consigne précise. «Comme c’est compliqué d’être créatif et en plus de le faire en collaborant, et dire qu’on est en dernière année du collège et en plus en option arts visuels», s’exclame un étudiant. Progressivement, chacun des groupes trouve son mode de fonctionnement, avec plus ou moins d’esprit collectif. Comme le résume une collégienne, «c’est une expérience déstabilisante, mais intéressante, car cela ouvre les portes de l’imagination, ce qui devient inhabituel après l’enfance». Progressivement, une équipe raconte une histoire autour de l’Ile de Pâques, ayant intégré le sable et la coquille d’escargot amenés, tout en introduisant dans le récit qui s’est construit dans la fluidité le bout de bois proposé par Maria Ceppi. Une poignée est placée pour s’accrocher et se rassurer en découvrant les mystères des statues. Les deux autres groupes ont voyagé au milieu des étoiles ou dans l’élasticité du futur.
Pour Grégoire Züger, l’enseignant d’arts visuels venu avec sa classe, ce genre d’initiative est très intéressante pour ouvrir à la créativité. Ursina Balmer est ravie de constater que cette proposition de la médiation culturelle a été plébiscitée par les collégiens qui se sont engagés avec enthousiasme dans cette aventure originale. Pour eux, c’était une première et ils ne diraient pas non à d’autres rencontres avec d’autres œuvres et d’autres artistes en pouvant se confronter à leur propre créativité. Cette expérience de lâcher-prise les a enthousiasmés. Alors si faire un pas à côté du programme, tout en développant l’une des capacités transversales de vos élèves, vous tente, n’hésitez pas à contacter la médiation culturelle des musées. Osez l’aventure…
Nadia Revaz
Pour en savoir plus
A propos des Musées cantonaux
A propos des œuvres de Maria Ceppi
Lien vers le pdf de l'article